Dominique de Villepin a souhaité mercredi qu’en 2010 cessent « les illusions de la rupture » et les « divisions stériles », dans des voeux en vidéo qu’il a prévu de mettre en ligne mercredi sur le site Internet du Club Villepin.
Dans une transcription de son allocution envoyée à l’AFP, Dominique de Villepin s’en prend particulièrement au débat sur l’identité nationale, « qui a créé l’égarement et la confusion, car l’enjeu n’est pas qui nous sommes ».
« Quelles que soient nos origines, nos confessions, nos sensibilités – nous le savons fort bien – l’enjeu c’est d’être fidèles à ce que nous sommes, à ce que nous voulons être. Nous sommes français par le coeur, par la volonté de vivre ensemble », poursuit-il.
« Assez des illusions de la rupture. Assez des divisions stériles », affirme l’ancien Premier ministre.
Rendant hommage au Grenelle de l’environnement et à la présidence française de l’Union européenne, « sous l’impulsion du président de la République », il juge toutefois que « cela ne saurait suffire ».
Dominique de Villepin en appelle par conséquent aux « fondamentaux français », citant « la République », la « protection sociale garantie » pour tous, « un modèle économique équilibré » et des « institutions respectées ».
« Il faut défendre nos points forts, mais il faut aussi renforcer nos points faibles comme je l’ai fait comme Premier ministre entre 2005 et 2007″, dit-il encore.
Source: Agence France Presse
Le verbatim de la vidéo des voeux de Dominique de Villepin
« Chers amis,
Permettez-moi, à l’aube de cette nouvelle année, de vous adresser, à chacune et chacun, mes meilleurs vœux pour vous-mêmes, pour vos familles et pour tous ceux qui vous sont chers.
Pour beaucoup, je le sais, cette année a été une année difficile. La nouvelle année doit être celle d’un nouveau départ, avec une volonté résolue d’aller de l’avant, de tirer les leçons du passé et d’engager un travail de réflexion et de proposition. C’est tout l’esprit de notre Club que de s’inscrire au-delà des partis et de tous les clivages partisans dans une dynamique d’action positive et constructive.
Nous faisons face à des défis exceptionnels, liés au changement climatique, au risque de prolifération et de terrorisme, à la crise économique et financière.
Face à ces défis, l’action est plus que jamais nécessaire, et nous avons besoin d’énergie, d’esprit d’initiative, énergie et initiative qui ont été hier au rendez-vous du Grenelle de l’Environnement comme de la présidence française de l’Union européenne, sous l’impulsion du Président de la République. Mais cela ne saurait suffire. Pour être efficace, cette action doit répondre à certains principes, de rassemblement, de justice, d’équilibre. Pour être efficace elle doit également se concentrer sur l’essentiel évitant le risque de la confusion, de la dispersion, de la division.
Dans ce contexte, je voudrais insister sur l’importance d’un retour aux fondamentaux de la France. Assez des illusions de la rupture. Assez des divisions stériles. Le débat sur l’identité nationale a créé l’égarement et la confusion, car l’enjeu n’est pas qui nous sommes. Quels que soient nos origines, nos confessions, nos sensibilités – nous le savons fort bien – l’enjeu c’est d’être fidèles à ce que nous sommes, à ce que nous voulons être. Nous sommes Français par le cœur, par la volonté de vivre ensemble, dans un pays d’exception que nous aimons et que nous voulons faire vivre.
Alors, revenir aux fondamentaux français, c’est d’abord défendre nos points forts :
* La République, toute la République, enracinée dans le quotidien de chacun, vivante sur l’ensemble du territoire, qu’il s’agisse de la liberté, de l’égalité ou de la fraternité.
* Une protection sociale garantie pour toutes et tous, qu’il s’agisse de la santé, de la retraite ou encore de l’éducation.
* Un modèle économique équilibré et diversifié, avec une agriculture forte, une politique industrielle revivifiée et un secteur des services ouvert aux nouvelles opportunités.
* Des institutions respectées, un Président qui préside, un Gouvernement qui gouverne, un Parlement qui contrôle et fait la loi, une justice indépendante, des médias libres qui informent, autant d’évidences qu’il fait bon rappeler et qui nous appellent à la vigilance.
Il faut défendre nos points forts, mais il faut aussi renforcer nos points faibles comme je l’ai fait comme Premier Ministre entre 2005 et 2007. Les trois batailles prioritaires à mener restent :
* La bataille de l’emploi et en particulier celui des jeunes, des femmes, des seniors.
* La bataille de la compétitivité et nous y serons aidés par les priorités rappelées par la Commission Juppé-Rocard en matière d’innovation.
* La bataille contre le déficit et l’endettement, alors que certains de nos voisins ont choisi la voie du redressement et de la volonté. Plus nous serons exigeants, plus nous serons en mesure de renouer rapidement avec la croissance.
Défendre les fondamentaux de la France, c’est permettre à la France de renouer avec sa vraie vocation européenne et mondiale.
* Une France à la pointe des propositions en matière de gouvernance politique, économique, financière, écologique.
* Une France au service de la justice et de la paix, en Afrique, au Proche Orient, où les Etats-Unis seuls ne peuvent forcer les conservatismes. En Afghanistan, où, nous le savons, la solution ne saurait être d’ordre militaire. En Iran, où chaque jour davantage s’affirme une volonté de changement.
* Une France soucieuse de son indépendance, qui ne saurait se laisser enfermer dans des rapports de force ou d’intérêt et qui dispose d’une culture diverse et vivante qui constitue autant de ponts et de chances.
2010 doit être l’année du sursaut où la politique, loin de tout calcul et de toute arrière-pensée, nous rassemble tous dans le service des Françaises et des Français, dans le service de l’intérêt général.
Chers amis, à notre place, au sein de notre Club, voilà notre feuille de route, voilà le cap que nous garderons jour après jour. Ensemble, retrouvons la grandeur et l’ardeur de la France.
Je souhaite à chacune et à chacun d’entre vous une très bonne et heureuse année. »
Dominique de Villepin
La lettre adressée par Dominique de Villepin aux membres du Club Villepin
« 2009 a été une année de chocs et de bouleversements pour nous tous. Une crise économique sans précédent depuis l’après-guerre, une hausse vertigineuse du chômage, la prise de conscience d’urgences globales comme le changement climatique bien sûr, mais aussi la faim.
2010 sera une année de défis à relever. C’est maintenant qu’il s’agit de trouver les voies du renouveau de notre société, de la reconstruction de notre économie. Peu de générations auront eu autant de responsabilité et autant de liberté. A nous de nous hisser à la hauteur des défis.
Mais pour donner des repères aux citoyens de notre nation dans la mondialisation, nous ne croyons pas qu’en monopolisant la parole, en dictant l’agenda et en débauchant des personnes, on peut aller de l’avant. Voilà pourquoi nous avons voulu apporter notre pierre à la construction commune. Nous avons choisi de sortir des sentiers battus, car le nouveau ne saurait être de l’ancien déguisé, pas plus que de faux débats ne sauraient construire une vraie politique.
Le Club Villepin a franchi un cap ; notre dernière rencontre à la Maison de l’Amérique Latine a montré le dynamisme et la mobilisation de tous ses membres. Je mesure les sacrifices de chacun pour concilier votre engagement avec votre activité professionnelle et votre vie familiale. Grâce à vous, notre Club est parvenu à s’installer dans la vie publique comme un lieu de débat moderne, ouvert et imaginatif. Tout cela n’est qu’un début. D’autres missions nous attendent, et notamment le travail de nos équipes de réflexion et de proposition qui a commencé et portera bientôt ses fruits. Une alternative se construit.
Je voudrais profiter de ce regard sur l’année passée pour vous dire ma reconnaissance pour votre ardeur à la tâche. Elle est d’autant plus grande que j’ai dû traverser personnellement des épreuves difficiles. Je ne peux manquer de vous dire à cette heure combien votr
e soutien a été précieux. Notre engagement est plus que jamais nécessaire, au milieu du doute et de l’incertitude. Que voulons-nous ?
A l’heure des sondages et des jeux d’opinion, nous voulons montrer que des vrais débats sont possibles, sans faux-semblants, sans coups médiatiques, avec un travail de fond et de réflexion, un travail collectif au service de l’intérêt de la nation. Bien sûr cela passe par une compréhension exigeante des nouvelles lois du monde, mais surtout par une écoute attentive des souffrances et des aspirations des Françaises et des Français.
Ayons le courage de la justice dans nos propositions et de la fidélité à nos principes républicains. Veillons à ne laisser personne au bord du chemin. Nous avons besoin de respect, d’équilibre et de résultats.
Nous voulons plus de nation, c’est vrai, car nous voulons un pays maître de son destin, capable de choisir et de changer, avec des citoyens soucieux de faire vivre nos valeurs. Le devoir de la nation, c’est le rassemblement. Le devoir de l’Etat, c’est le service des Français. Le devoir du citoyen, c’est le service de l’intérêt général.
Nous voulons aussi une Europe plus forte, plus assurée sur ses bases, capable de dépasser enfin sa crise institutionnelle. Souhaitons que 2010, avec la mise en œuvre du Traité de Lisbonne, soit le nouveau départ tant attendu.
Nous voulons un monde mieux gouverné et plus conscient de ses défis communs, pour trouver une nouvelle architecture multipolaire capable de résoudre progressivement ces crises, car, au Proche Orient comme en Afghanistan, l’année 2009 n’a pas permis de concrétiser les espoirs nés de l’élection de Barack Obama.
En ces temps difficiles, nous avons plus que jamais besoin de vous pour porter notre projet commun au service de l’intérêt général.
Avec estime et amitié, je vous adresse, à vous et à votre famille, tous mes vœux pour cette nouvelle année. »
Dominique de Villepin